Commencer par écrire l'essentiel
Cette rencontre a commencé par une entrée en musique de Joël Versavaud au saxophone baryton. Ensuite Georges Bœuf nous a raconté l'histoire de sa partition, Le vol de Cornelius.
La partition a été commandée par André Carboulet, ancien élève de solfège du compositeur et jouée à l'occasion du tricentenaire de la clarinette en 1990. Lors de leur discussion, André Carboulet a proposé le cor de basset et Georges Bœuf le quintet. Georges a parlé il y a peu de temps de la partition à Joël Versavaud saxophoniste qui en a parlé à Michaël Dian qui en a ensuite parlé au quatuor Bela. La partition étant écrite pour cor de basset il a fallut la retranscrire pour saxophone, une transcription peu évidente qui tient sa réussite surtout de son interprète.
Le Vol de Cornelius a deux histoires, une plus abstraite, la construction esthétique de l’œuvre, et l'autre, concrète, la rencontre avec un oiseau. Georges Bœuf a conçu sa partition autour d'un motif thématique qui est entendu en entier seulement à la fin de la pièce. Il se construit peu à peu et finit par disparaître, se développe dans la tessiture, s’accélère et se ralentit. Le motif est modifié par des paramètres indiqués dans les titres des mouvements : Lyrique ou Passionné et contrasté ou encore Mécanique. Dans ce quatrième mouvement, il développe l'accélération, créant ce qu'on appelle une « illusion acoustique » par le départ en décalé des instruments commençant avec le même tempo et s'accélérant peu à peu pour finalement créer un son continu. L'idée du compositeur a été de ne pas commencer à écrire son œuvre par le début comme le voudrait la logique occidentale. C'est ce qu'il conseillait à ses élèves de classe de composition « Commencez par écrire l'essentiel, ce qui vous importe le plus ».
La rencontre avec Cornelius eu lieu un jour d'été 1989. Alors qu'il se promenait avec des amis dans un village de l'Hérault, il fut suivi par une corneille. La corneille, bien connue du village, avait été baptisée Cornelius. Alors qu'ils s’apprêtaient à partir, la corneille s'est approchée de la voiture, essayant d'y rentrer, et s'est finalement accrochée au rétroviseur. Lorsque la vitesse a été trop importante, la corneille s'est lâchée, volant à hauteur puis devant la voiture. Quand ils sont arrivés à la sortie du village, l'oiseau a pris un magnifique envol.
Après cette aventure, Georges a relu sa partition et a vu une correspondance entre chaque mouvement et le vol de Cornelius. Cette anecdote est encore très vivante dans l'esprit du compositeur...